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RÉCIT DE TRANSAT SAINT BARTH -HORTA



01h00 du matin.

L'heure de relayer Cathy qui vient m'aider à monter sur le pont pour prendre mon quart.

Si le réveil est difficile, il est vite oublié par le spectacle qu'offre le ciel en mer. Je ne manquerai pour rien au monde ce rendez-vous nocturne et solitaire avec le ciel étoilé et les vagues, parfois chargées de phytoplancton bioluminescent, qui glissent sur la coque d'Estrella.

L'air est humide et encore relativement doux, le ciel d'un noir profond saupoudré d'étoiles, où l'on voit clairement l'alignement de Venus, Jupiter et Mars, le tout animé d'un festival d'étoiles filantes.

Un vrai spectacle je vous dit.


Nous entamons notre cinquième jour de navigation.

La chaleur écrasante de Saint Barth, où nous nous sommes arrêtés avant d'entamer la traversée, semble bien loin. Et l’on repense avec plaisir à l’accueil chaleureux de Richard, l’ami de Christophe, qu’on aura essayé de shanghaïer jusqu'au dernier soir autour d’un verre au Select. Ça c’est joué de peu. L’année prochaine peut-être !

Là vie de bord s'installe tranquillement et on découvre avec bonheur la navigation en équipage réduit.

Nous sommes quatre à bord pour cette première partie du retour à la maison.



Christophe Lebas, coureur de courses au large au pedigree impressionnant, notamment de La Solitaire du Figaro, une des courses en solitaire les plus exigeantes.

Géo Trouvetou, il s'implique à fond dans le bateau et règle un à un les nombreux problèmes d'Estrella. Il ne cessera de nous impressionner par son ingéniosité et sa capacité à analyser et réparer avec les pauvres moyens du bord, de la mécanique à l’électronique en passant par la bidouille de confort, le tout avec un bateau bien gîté…

Ah, et on peut dire qu’il touche sacrément sa bille en analyse météo…









Marc Fiorese, ancien joueur pro de rugby en première division du Stade Rochelais et ingénieur en géni électrique. En transition professionnelle, il est venu chercher dans cette traversée une aventure humaine mais aussi personnelle, pour apprendre le lâcher prise et s'offrir le temps d'une introspection.

Et pour ça, une transat est plutôt une bonne école. Pas toujours évident quand il faut accepter les imprévus, techniques, météo, humains et s’adapter à un environnement parfois hostile qui peut mettre les corps à rudes épreuves. Déplacements difficiles, mal de mer dont il aura fini par se débarrasser au bout de quelques jours, oublier ses attentes pour embrasser l’instant, tâcher de se déconnecter de son monde terrien et se laisser porter par les imprévus de la voile…

Petit à petit il gagne en aisance et, en bon centurion, au bout d'une semaine il fera ses pompes à l'avant du bateau histoire de garder la forme !



Cathy, pilier d’Estrella qui sait où sont chaque chose et rend la vie à bord tellement agréable. C’est la seule à faire la boucle complète. Présente depuis le départ de La Rochelle le 11 novembre dernier, elle n’aura quitté le bord que trois semaines, troquant la marina du Marin en Martinique pour la maison de Didier à Petit Bourg en Guadeloupe. Mission woofing chez notre ami Didier, producteur de curcuma bio dont on ramène une partie de la production à la voile. Du dédoigtage au rinçage des rhizomes à la rivière en passant par la transformation en paillette et au séchage, elle aura assisté à une bonne partie de la production. Une aventure dans l’aventure comme on les aime et qu'il faudra bien qu'on vous raconte d’ailleurs....



Et moi, Olivia, ravie de pouvoir participer au retour d’Estrella à lson port d'attache de La Rochelle, après plusieurs mois passés aux Antilles à essayer, avec Cathy, de faire rayonner le projet, accueillir les navigants, poser les jalons pour l’année prochaine et tenter, tant bien que mal, de prendre soin de notre étoile.

Ces moments de quart de nuit seule sur le pont sont l’occasion de commencer à passer en revue l’année passée, d’analyser les échecs, les réussites, les difficultés, le chemin parcouru et essayer de digérer tout ça pour mieux préparer la suite. Parce que vous vous en doutez, ce n’est que le début !

Mais il faut profiter de l’instant et de cette navigation hautement symbolique pour Estrella Lab qui prend le chemin de la maison !

Alors j’observe avec admiration le lever de soleil que je partage avec Marc, venu prendre la relève. Et j’ai du mal à regagner ma banette, scotchée par ce qu’il se passe autour de nous.




 


Voilà presque sept jours que nous avons quitté Saint Barth, parcourant pas loin de 12000 miles soit un peu plus de la moitié de la route.

La vie de bord s'est tranquillement installée au rythme des quarts, de la bricole et des petits plats incroyables que nous concocte Cathy.

Le tout ponctué d'événements souvent très cool, parfois beaucoup moins.


Comme dimanche dernier, journée aux conditions idéales pour sortir le spi.

Toujours un peu magique de le voir se gonfler de vent et nous faire prendre 3 nœuds comme si de rien n'était. On s'émerveille comme des gosses devant ce bleu éclatant étalé sur 190m2. On se laisse bercer par le nouveau rythme qu'il installe, doux et régulier, et on s'attable, bienheureux de s'offrir un déjeuner ensoleillé sous spi.

Mais voilà que sans prévenir et sans raison apparente, il se déchire sur toute sa longueur ! Triste spectacle qui vient entacher cette journée pourtant si bien commencée.

Mais on décide de ne pas laisser ce coup dur flinguer le moral des troupes. Les galères, on commence à savoir les apprivoiser depuis deux ans, et on trouvera bien une solution pour le faire réparer ou le remplacer si la chirurgie n'est pas possible !

Alors on le ramène en douceur à bord, on le range correctement et on passe à autre chose.

Bon, je ne vous cache pas qu'on s'est quand même couché un tantinet plus tôt que d'habitude ce soir là...




Et la vie de transat reprend son cours. Pêche (de sargasses principalement), bricoles, lecture, cuisine, observation des physalies, ces êtres étranges qui vivent à trois en symbioses, flottants à la surface de l'eau. Sorte de bulle, flotteur, translucide bordé d'une crête rose, dans laquelle il y aurait comme une anémone bleue, et sous laquelle trainerait entre 10 et 50 mètres de filaments. Encore une interrogation à ajouter à la liste des trucs à comprendre quand on arrivera à terre.

Et voilà qu'on entend "Dorade ! Dorade !"

Au bout de la ligne, une magnifique dorade corifène que Marc et Christophe parviennent à remonter à bord. La toute première d'Estrella ! Ils l'ont tué d'un ptit coup de rhum dans la gueule, technique plutôt efficace transmise par Isa en Guadeloupe.

Marc s'attèle à lever les filets, que l'on s'empresse de déguster au déjeuner, mariné à l'huile d'olive, citron vert et gros sel. On peut difficilement faire plus frais. Un délice.

Celle qu'on appela Martine nous régala pour quatre repas, en tartare, en tataki aux graines de sésames grillées et en ragoût, sous la main experte de Cathy. On en a pas laissé une miette.

Nous découvrons avec plaisir la navigation en équipage réduit et on se dit que, finalement, à quatre c'est pas mal aussi.

Pour l'instant les conditions sont relativement faciles et l'on devrait bientôt sortir de la pétole qui nous accompagne depuis plus de 24h.

On, enfin Christophe, profite donc d'avoir le bateau à plat pour faire quelques travaux en attendant le vent qui ne devrait pas tarder à rentrer. Et nous faire reprendre un rythme de navigation plus soutenu.



Et des bricoles il y en a !

Le moteur du pilote qui nous lâche, réparé en ré-utilisant des charbons d’un vieil alternateur que Christophe avait récupéré à Saint Barth.

À la base dans l’idée de le démonter afin d’y extraire les diodes pour notre alternateur moteur…

Entre le diagnostic, la réflexion, le démontage etc il y a passé un sacré moment, durant lequel Marc a pris vaillamment la barre en main.

Puis le lendemain, c’est notre capteur d’angle qui s’y met ! Capteur qu’il parvient cette fois à remettre en route en utilisant, autre autre, un long bout de ma rallonge de bureau… En terme de système D on est pas mal, et même si il aurait bien préféré faire autre chose, je peux vous dire qu’on est bien content d’avoir Christophe à bord ! Quarante ans d’expérience et de solitaire qui s’exprime… C’est beau et c’est précieux !




Ce qui est bien en transat, c’est que la nature à l’art de nous faire oublier les galères. Un petit banc de dauphins qui font la fête au bateau et ça repart !

Et la nuit du 15 au 16 mai, cadeau dont on se souviendra longtemps : ÉCLIPSE DE LUNE !




Quelle chance inouïe de voir ça du milieu de l’Atlantique ! Visibilité parfaite, étoiles filantes, plancton bio luminescent dans les vagues qui caressent la coque, on voit bien la grande voile et le joli flocage Estrella Lab sur le lazy bag.

On ne sait plus où donner de la tête. Partout où ce tourne notre regard c’est beau.

On s’offre une gorgée de rhum vieux

chacun sous l’éclipse pour sceller le moment et on se dit que rien que pour ça, ça vaut le coup de traverser l’Atlantique.


Puis, après une dernière nuit agitée, terre en vue !

Plus que quelques miles avant le retour à la civilisation, toujours dans un vent soutenu qui nous porte à plus de 9 noeuds depuis 05h du mat.

C’est l’heure d’ouvrir les yeux et les narines pour apprécier l’atterrissage même si, une fois n’est pas coutume, la météo n’est pas vraiment avec nous. Ciel bâché et petites pluie fine nous accompagne…

La visibilité est mauvaise, le volcan Pico sous les nuages mais on devine quand même la côte et cet impressionnant rocher planté à l’entrée du port d’Horta.

Ça sent l’arrivée et l’apéro chez le légendaire Peter Café !


Pas de place au port, on se met au mouillage.

Si on est pile poil à l’heure pour le vol retour de Marc, on ne pourra malheureusement pas trinquer tous ensemble chez Peter.

On sort l’annexe et c’est sous une pluie battante que nous faisons nos adieux, un peu tristou de ne pas pouvoir atterrir tous ensemble, mais on se rattrapera à La Rochelle !

Christophe emmène Marc à terre, ils passent à la capitainerie, nous aurons une place au ponton ce soir !

Ils arrivent quand même à se prendre une bière chez Peter avant que le taxi pour l’aéroport arrive, clôturant ainsi cette belle étape parcouru en 12 jours, 17h et 18mn !



Photo de l'quipage en veste de quart, sous la pluie lors de l'arrivée à Horta

Bravo l'équipe !






Tracé de la route d'Estrella sur la carte

Place au repos, rangement et bricoles avant d'accueillir le nouvel équipage pour la deuxième étape !



Logo Estrella








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